jeudi 25 décembre 2008

Quelques scolies choisies de Nicolás Gómez Dávila

Joyeuses fêtes à tous ! Voici quelques pensées en guise de cadeau.
L'univers est important s'il est apparence, insignifiant s'il est réalité.

Nous ne sommes pas la somme de nos actes. Nous sommes l'intégrité de notre cristal secret, ou sa plus secrète fêlure.

Au fin fond du labyrinthe de notre âme grogne un singe apeuré.

Les plaisirs qui nous comblent sont avant tout ceux que souvent nous laissons innomés tant ils sont humbles.

Les choses n'exhalent leur essence qu'entre les doigts crispés de la nostalgie ou du désir.

Le monde où il vaudrait la peine de voyager n'existe plus que dans les vieux livres de voyage.

L'homme traque le désir et ne capture que la nostalgie.

Les palais se construisent avec les décombres des rêves.

Le Réactionnaire authentique, Nicolás Gómez Dávila

vendredi 12 décembre 2008

Pensée du jour, III

C'est le sentiment noble qui nous interdit de n'être que des jouisseurs de la vie. Ce sentiment se révolte contre toute espèce d'hédonisme. Nous devons nous acquitter de quelque chose en retour. - Mais la croyance fondamentale de la masse, c'est qu'il faut vivre pour rien, - c'est là sa vulgarité.

Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra

dimanche 7 décembre 2008

Induire des rêves lucides

Pour tous ceux intéressés par les voyages oniriques, j'ai récemment fait l'expérience d'une technique permettant de les induire assez facilement. Il existe une variété de solutions pour amorcer un rêve lucide, mais la plus efficace dans mon cas revient à s'endormir progressivement en voulant, d'une part, atteindre un état de lucidité, tout en se concentrant, d'autre part, sur une image particulière (n'importe laquelle). A l'évidence, cette technique ne peut fonctionner la veille d'une longue nuit de sommeil ; les rêves lucides ne survenant qu'en période de sommeil paradoxal, ce n'est qu'au petit matin (avant de s'endormir à nouveau) ou avant une sieste par exemple qu'elle peut être efficace.

Une fois entré dans le rêve lucide, il peut être difficile de maintenir la lucidité. Il est tout d'abord important de ne pas trop s'exciter, bien qu'il est vrai que ce soit difficile pour un débutant, tant l'expérience du rêve lucide peut être curieuse et déroutante. Lorsque l'on sent que la lucidité s'efface subitement, que l'on perd pied pour ainsi dire, j'utilise la même technique pour ma part que lors de l'endormissement : je me concentre sur une image, sur un détail (par exemple, ma montre, ou les caractères imprimés sur une feuille de papier) ce qui a pour effet de renforcer fortement et directement la lucidité.

Je prodiguerai éventuellement d'autres conseils à ce propos au grès de mes futures expériences.

jeudi 27 novembre 2008

Le poids du passé

Je me faisais hier la réflexion suivante : en quoi un passé peut-il être plus lourd à porter qu'un autre ? Le passé nous est inaccessible ; le seul passé qui demeure vit en nos souvenirs. Quelle différence fondamentale peut-il bien exister entre des souvenirs véritables, renvoyant à des faits réels, et des souvenirs imaginaires, créés de toute pièce par l'esprit humain ? Ce ne sont, dans un cas comme dans l'autre, que des images dans notre tête et c'est d'autant plus vrai que les souvenirs "véritables" eux-mêmes sont partiellement artificiels, de par les exagérations et les oublis qui les accompagnent.

mercredi 26 novembre 2008

Pensée du jour, II

Se faire des amis est un plaisir de bourgeois, se faire des ennemis un plaisir d'aristocrate.
Henri de Montherlant

samedi 22 novembre 2008

Pensée du jour, I

L'imagination vaut bien des voyages et elle coûte moins cher.
George William Curtis, Aphorismes

vendredi 17 octobre 2008

Volonté de Dieu ou liberté humaine

Quelques réflexions à propos d'un problème qui me semble, de prime abord, impossible à résoudre... Un certain nombre de philosophies et de religions affirment l'existence d'un libre arbitre de l'homme, tout en posant d'autre part l'existence d'une volonté divine à l'œuvre à travers le monde, Dieu étant doué de prescience. De ces idées sont déduites un ensemble d'hypothèses, selon lesquelles l'histoire humaine serait dans ses grandes lignes dictée par Dieu, les "petites" étant abandonnées à la volonté de l'homme.

Tout ceci se heurte à deux difficultés. Il est inutile sinon absurde, d'abord, de supposer l'existence d'une liberté humaine limitée à l'insignifiant ; quel serait son sens ? Séparer ce qui importe de ce qui est superflu est par ailleurs strictement impossible : ce que l'on juge ou paraît secondaire influe toujours sur les grands événements, lesquels n'auraient souvent pu se produire si d'infimes détails n'eussent pas été ce qu'ils furent. En outre, si l'homme est libre face au plan de Dieu, si chacun peut s'inscrire ou non dans des voies qui seraient déjà tracées, chaque événement déterminant chaque événement et chaque homme influant ses semblables, comment notre vie pourrait être jalonnée d'épreuves et d'événements déterminés par avance ?

Si Dieu connaît par avance la vie que je dois mener, c'est qu'il possède la connaissance de tout ce qui doit se produire, c'est-à-dire de tous les événements, eux-mêmes agis par des hommes censés être libres. Ou je suis libre et tout est illusoire, ou nous n'avons tous aucune marge d'autonomie.

jeudi 28 août 2008

Soljénitsyne sur la liberté de la presse

La presse, aussi, bien sûr, jouit de la plus grande liberté. Mais pour quel usage ? (…) Quelle responsabilité s’exerce sur le journaliste, ou sur un journal, à l’encontre de son lectorat, ou de l’histoire ? S’ils ont trompé l’opinion publique en divulguant des informations erronées, ou de fausses conclusions, si même ils ont contribué à ce que des fautes soient commises au plus haut degré de l’Etat, avons-nous le souvenir d’un seul cas, où le dit journaliste ou le dit journal ait exprimé quelque regret ? Non, bien sûr, cela porterait préjudice aux ventes. De telles erreurs peut bien découler le pire pour une nation, le journaliste s’en tirera toujours. Etant donné que l’on a besoin d’une information crédible et immédiate, il devient obligatoire d’avoir recours aux conjectures, aux rumeurs, aux suppositions pour remplir les trous, et rien de tout cela ne sera jamais réfuté ; ces mensonges s’installent dans la mémoire du lecteur. Combien de jugements hâtifs, irréfléchis, superficiels et trompeurs sont ainsi émis quotidiennement, jetant le trouble chez le lecteur, et le laissant ensuite à lui-même ? La presse peut jouer le rôle d’opinion publique, ou la tromper. De la sorte, on verra des terroristes peints sous les traits de héros, des secrets d’Etat touchant à la sécurité du pays divulgués sur la place publique, ou encore des intrusions sans vergogne dans l’intimité de personnes connues, en vertu du slogan : « tout le monde a le droit de tout savoir ». Mais c’est un slogan faux, fruit d’une époque fausse ; d’une bien plus grande valeur est ce droit confisqué, le droit des hommes de ne pas savoir, de ne pas voir leur âme divine étouffée sous les ragots, les stupidités, les paroles vaines. Une personne qui mène une vie pleine de travail et de sens n’a absolument pas besoin de ce flot pesant et incessant d’information. (…) Autre chose ne manquera pas de surprendre un observateur venu de l’Est totalitaire, avec sa presse rigoureusement univoque : on découvre un courant général d’idées privilégiées au sein de la presse occidentale dans son ensemble, une sorte d’esprit du temps, fait de critères de jugement reconnus par tous, d’intérêts communs, la somme de tout cela donnant le sentiment non d’une compétition mais d’une uniformité. Il existe peut-être une liberté sans limite pour la presse, mais certainement pas pour le lecteur : les journaux ne font que transmettre avec énergie et emphase toutes ces opinions qui ne vont pas trop ouvertement contredire ce courant dominant.

Extraits du discours d'Alexandre Soljénitsyne à Harvard, le 8 juin 1978
À la lecture de la presse, on se dit que les propos de Soljénitsyne sont probablement plus proches de la vérité que d'un pessimisme exagéré. Quand un journal a pour première nécessité de faire du chiffre, il se doit d'être lisible par un maximum de lecteurs potentiels, ce qui revient en d'autres termes à descendre au niveau du plus imbécile d'entre eux. Au vu de l'engouement que suscitent des reality shows d'une stupidité atterrante, je me dis qu'il ne faut pas espérer de quelconques changements positifs dans un futur proche.

dimanche 30 mars 2008

Croyance et athéisme

On présente souvent l'athéisme comme la croyance en la non-existence de Dieu. Ce n'est évidemment pas faux ; cependant lorsque l'on reconnaît généralement que la non-existence de Dieu ne peut être prouvée et ainsi tenue pour certaine, on part cependant du principe que la véridicité de la réalité que l'on appréhende est un fait. En d'autres termes, la démarche athée consiste à prendre acte de l'existence du monde extérieur et de rejeter comme spéculation l'existence de Dieu. Si la réalité de l'univers est certaine, nous n'avons en revanche aucune information sur sa nature (chose que je sous-entendais dans un précédent article à propos de l'identité). Qu'est-ce à dire ? Toutes nos connaissances nous sont transmises par nos sens, hors nous n'avons aucune information sur la source de ces informations. Le sujet a déjà été abordé de nombreuses fois par des auteurs de science-fiction de même que par des philosophes. Prétendre que Dieu n'existe pas, c'est penser que l'univers se suffit à lui-même, ce qui est un acte de foi. Pour être plus clair, ce n'est pas seulement l'idée de la non-existence de Dieu qui relève par nature de la croyance -- ce ne serait qu'une évidence que de souligner cela -- mais également l'idée que l'univers est "vrai", dans le sens où il ne pourrait être une illusion cachant quelque chose de plus profond. C'est fondamentalement la raison pour laquelle les caricatures telles que celle de la "licorne rose invisible" n'ont aucun sens : s'interroger sur l'existence de Dieu, c'est immanquablement s'interroger sur la nature de l'univers que nous appréhendons.